Les start-up de la mer (épisode 2) : l’éolien offshore

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Le futur énergétique de la planète se cache peut-être au large… comme c’est déjà le cas au-delà des côtes de plusieurs pays européens : au large du Kent par exemple, cette région verte et calme en face de Calais et de la France, la plupart d’entre nous l’ignorent mais c’est là que se cache le plus vaste, le plus impressionnant champ d’éoliennes offshore du monde. Vues du ciel, elles paraissent minuscules, il faut être à leur pied pour réaliser leur taille : chacune mesure 120 mètres, c’est la hauteur de la tour Eiffel depuis le sol jusqu’au deuxième étage, ou encore, de la célèbre roue de Londres !

 

Dans les zones maritimes balayées par la houle, là où les vents sont souvent puissants, chacun de ces monstres peut approvisionner environ 2000 foyers en électricité, tandis que l’ensemble d’un champ éolien peut globalement fournir de l’électricité à 500 000 habitants, c’est-à-dire la population d’une grande ville de province française, comme Lyon ou Toulouse. Il a fallu une logistique hors norme, et deux années entières de travail, pour construire cette forêt maritime de très haute technologie.

 

« Nous avons le sentiment d’écrire un nouveau chapitre de l’évolution humaine et de l’histoire des énergies », expliquent fièrement les personnels des start-ups qui se sont lancées dans l’aventure. « Les énergies renouvelables, c’est l’avenir, et je peux vous dire que trouver un emploi aujourd’hui dans ce secteur, c’est s’assurer un boulot à vie ! », témoignent-ils. Alors que les réserves de pétrole diminuent et que les centrales nucléaires et thermiques sont vieillissantes, les pays d’Europe sont obligés d’innover. Et les start-ups qui ont compris que la mer était un atout, que les marées généraient une incroyable énergie, gratuite qui plus est, ces entreprises-là ont le vent en poupe, et elles recrutent. D’ailleurs, si les Britanniques sont leaders dans ce domaine, la France n’a pas dit son dernier mot.

 

Certes, entre les appels d’offres retardés, les recours d’opposants, la crise traversée par Alstom et Areva, qui ont dû vendre leur branche éolien offshore à un investisseur américain pour le premier, à un groupe germano espagnol pour le second…  nous avons du retard au démarrage. Mais l’objectif pour la France reste de posséder ses propres parcs d’éolien en mer, fonctionnels, d’ici 2023. A une dizaine de kilomètres des côtes françaises, au large du Tréport, du Havre, de Fécamp, de Courseuilles-sur-Mer, mais aussi de Saint-Brieuc ou Saint-Nazaire, des centaines d’éoliennes devraient un jour produire de l’électricité. Objectif : créer 10 000 emplois, à terme.

 

« On est sur un marché naissant et extrêmement prometteur », explique Emmanuel Rollin, directeur d’Ailes Marines qui pilote le projet de parc éolien offshore de Saint-Brieuc. « Et plus on avancera dans la transition énergétique promise, entre autres, par l’éolien offshore, plus on réduira les coûts et plus ce sera rentable pour le consommateur. Regardez le photovoltaïque, il était très cher au début, il est devenu extrêmement compétitif. N’oublions pas non plus que nous sommes en train de lancer une filière industrielle avec des milliers d’emplois à la clé. Autre avantage : une absence de déchets avec des éléments qui sont recyclables à un pourcentage extrêmement élevé, et aucune nuisance visuelle, loin des côtes. Aujourd’hui, tous les pays qui ont démarré avant la France, c’est-à-dire le Royaume-Uni, la Belgique, la Hollande, le Danemark… sont devenus compétitifs ».

 

« L’éolien flottant entre dans une phase de développement commercial », estime également aujourd’hui la société Idéol, basée à la Ciotat, dans le sud de la France, et devenue leader mondial des fondations flottantes pour l’éolien en mer avec son concept breveté. « Des équipes expérimentées, composées de plusieurs dizaines d’ingénieurs et d’experts issus des énergies renouvelables et de l’offshore pétrolier, travaillent actuellement sur plusieurs projets à travers le monde : la première éolienne en mer en France, actuellement en construction, le prochain démonstrateur d’éolien flottant au Japon dont l’installation est prévue en 2018, ou encore EolMed, une ferme pilote française d’éoliennes flottantes de 24 MW installée au large de Gruissan, à plus de 15 kilomètres des côtes méditerranéennes ».

 

Et ce n’est pas Nicolas Hulot, le ministre actuel de la Transition Energétique, qui renoncera à ce vert projet : en novembre 2017, il a confirmé sa volonté d’accélérer les procédures d’installations de parcs éoliens au large des côtes hexagonales, et sa volonté de promouvoir l’éolien flottant plutôt que l’éolien posé sur les fonds marins. Selon lui, « la filière est clairement promise à un grand avenir, et la démonstration de sa rentabilité écologique et économique viendra très rapidement ». Selon les estimations, la France a le potentiel pour devenir le  deuxième gisement éolien d’Europe, avec une production de plus de 6 000 mégawatts annuels.

 

A Saint-Brieuc en Bretagne, le parc éolien prévu depuis 2011 pourrait donc enfin voir le jour dès 2018, avec le concours d’Iberdrola, une entreprise espagnole spécialisée dans les énergies renouvelables : dans 2 ans, une soixantaine d’éoliennes auront très vraisemblablement été mises en route, pour 20 ans de service chacune, avant renouvellement. En Seine-Maritime, à Dieppe, plusieurs dizaines d’éoliennes doivent aussi équiper le large de la ville du Tréport, cette fois sous le contrôle commun d’Areva et de GDF Suez. Fin des travaux prévue d’ici 3 ans. A quelques kilomètres de là, du côté d’Etretat, EDF, Enbridge et WPD Offshore ont pour projet de construire un parc éolien offshore de plus de 80 éléments. Objectif d’ici 3 ans maximum : approvisionner quelques 800 000 foyers en électricité. Et c’est aussi EDF qui devrait implanter un parc de la même taille qu’à Etretat, mais du côté de Saint-Nazaire cette fois, en Seine-Maritime, à une vingtaine de kilomètres du rivage.

 

Autant de projets qui ont obtenu le feu vert, mais d’autres pourraient suivre, au terme d’une procédure que le ministre de la transition écologique veut donc accélérer : dans le nord de la France, au large des côtes de la Manche et de la Mer du Nord, un parc éolien offshore pourrait voir le jour du côté du Touquet, le résultat de l’appel d’offre sera connu dans quelques semaines, début 2018. Au large des côtes de la Manche toujours, Alstom et EDF ont soumis un projet similaire à validation. Enfin, un parc de quelques 80 éoliennes offshore pourrait également sortir de mer en Charente-Maritime, au large de l’île d’Oléron, d’ici environ 5 ans. Même chose du côté de l’île d’Yeu en Vendée, après enquête publique, ou encore du côté de Belle-Ile dans le Morbihan, avec installation prévue dès 2019 mise en service début 2020. Pour finir, la Méditerranée compte aussi son lot de projets, avec dans les cartons trois fermes éoliennes offshore, deux dans l’Aude et une dans les Bouches-du-Rhône.

 

 




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