L’emploi sera-t-il impacté dans la filière coquillages, touchée par la canicule ?

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En Méditerranée, des centaines d’hectares de parcs à huîtres viennent d’être décimés, le temps d’un été, par les températures saisonnières très élevées. La canicule a eu raison des coquillages, que la mer, trop chaude, 29 degrés en moyenne sur la Côte d’Azur, a ouverts avant l’heure et privés d’oxygène, en particulier dans les bassins fermés des producteurs. La période aurait du être faste, avec les premières récoltes. Las, sur l’étang de Thau, un bout de mer fermé par un bras de terre entre Agde et Sète, les récoltants doivent jeter la totalité des huîtres récupérées.« C’est une année de travail perdue, tout part à la poubelle », explique l’un d’eux. « Je perds 6 tonnes d’huîtres, 20 000 euros, la moitié de mon chiffre d’affaires annuel, mais c’est pareil pour tout le monde dans le coin. Quasiment 100% du bassin de Thau est impacté, on a perdu, à nous tous, près de 4000 tonnes. Cela représente plus de 13 millions d’euros pour l’économie locale. Et ça c’est pour les huîtres, mais on a perdu la même chose pour les moules, la quasi-totalité de la production. Et pour les huîtres, les pertes représentent au bas mot un quart de la production ».

 

Une catastrophe pour les professionnels de la filière, déjà impactés par des toxines au printemps, qui avaient conduit à des interdictions de consommer les coquillages sur certains secteurs. Ce nouveau coup dur aura-t-il un impact sur l’emploi ? « Sur l’emploi saisonnier oui, c’est une certitude. En général, les producteurs doublent leur main d’œuvre en emploi saisonnier, par exemple une exploitation de taille moyenne va employer 7 personnes à l’année, mais près de 25 entre juin et janvier, pour les récoltes, le traitement du produit, la vente sur les marchés, etc. L’été, puis les mois en R et jusqu’aux fêtes de fin d’année : voilà la période faste pour la conchyliculture et l’emploi associé », explique le comité départemental des pêches et des élevages marins du Gard, à Montpellier. « Il y aura des conséquences économiques, mais c’est difficile pour le moment de les mesurer, on en est aux premières estimations. Les poissons aussi ont souffert, on va voir quel est le bilan avec les pêcheurs ».

 

Mais les professionnels de la filière coquillages comptent bien rebondir et préserver l’emploi au maximum : ils en appellent d’ailleurs aujourd’hui à l’Etat pour obtenir des aides qui leur permettront de rebondir, après ce nouvel épisode écologique qui aura, disent-ils, été malgré tout « moins dramatique que la canicule de 2003 et de 2006, qui avait commencé dès le mois de juin, alors que celle de 2018 a démarré en juillet ». Pour l’Ifremer, « les températures de surface de la mer ont beaucoup progressé cet été, avec une croissance maximale la première quinzaine d’août. Jusqu’à la fin août les températures de l’eau de mer, tant en surface qu’en profondeur, devraient se maintenir sur le littoral à des niveaux rarement rencontrés, jusqu’à 3 à 4 degrés au-dessus des valeurs habituelles. C’est à la fois bénéfique pour les coquillages au moment des pontes, que les eaux tièdes du début d’été ont favorisé, elles ont été importantes et précoces sur l’ensemble des sites conchylicoles, avec des taux de survie des larves d’huîtres et un captage du naissain excellents. Mais ensuite le maintien et la montée de ces températures, de plus en plus élevées au fur et à mesure de l’avancée en août, ont provoqué un retour de bâton avec des fixations fragiles et ensuite un taux de mortalité élevé, heureusement en partie compensé par ces pontes exceptionnelles ».

 

Il faut aussi relativiser à l’échelle nationale : si le bassin de Thau et ses 600 producteurs ont été très impactés par ces « mauvaises eaux », liées à un phénomène très local que l’on appelle la malaïgue, et qui se traduit donc par une diminution de l’oxygène dissous dans les eaux de l’étang, ailleurs les coquillages ont aussi pondu de manière exceptionnelle, sans souffrir autant du réchauffement de la température en mer. En Gironde, le Centre Régional d’expérimentation et d’application Aquacole a encore relevé une « ponte massive » vers le 5 août 2018. Même chose pour les moules, dont la récolte se fera jusqu’en octobre : avec beaucoup d’eau douce tombée cet hiver et beaucoup de soleil cet été, la saison devrait être bonne, et les récoltes abondantes avec des produits de qualité. Même si la côte méditerranéenne a souffert, sur tout le littoral atlantique en revanche  l’activité et l’emploi devraient donc plutôt bien se porter pour la filière jusqu’à la fin de l’année, avec des quantités importantes à traiter.

 

 




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