Dessaler l’eau de mer : une filière d’avenir dans la France en pointe

Temps de lecture : 4 minutes

Le manque d’eau potable est devenu désormais, pour la planète et l’espèce humaine, un enjeu majeur : le nombre d’individus sur terre devrait atteindre les 8 milliards d’ici 10 ans, ce qui signifie que le ratio d’eau potable par habitant baissera de 6600 mètres cubes par personne, à 4800 mètres, soit une diminution d’un tiers ! Cela signifie que dans moins de dix ans, un homme sur 3, voire un homme sur 2 selon l’ONU, pourrait souffrir de ce que les experts nomment le « stress hydrique », c’est-à-dire le fait de devoir vivre avec moins de 1700 mètres cubes d’eau par an. Selon l’Organisation des Nations Unies, la problématique trouve essentiellement ses origines dans le fait que nous consacrons la majeure partie de nos réserves en eau (90%) à l’agriculture, pour booster la productivité de nos exploitations. Résultat : les ressources disponibles pour l’humanité vont en diminuant, selon ce choix cornélien : boire, ou cultiver pour manger.

 

Pour essayer de changer la donne, certaines entreprises ont donc imaginé de prendre le problème dans l’autre sens : pourquoi ne pas augmenter les ressources disponibles en eau potable, en dessalant l’eau des mers et des océans, qui représentent 97% des stocks de la planète ? Et dans ce domaine, la France a le vent en poupe : son expertise est de plus en plus reconnue à travers le globe, et ses entreprises performantes en matière d’innovation et de développement. Si la France est pionnière dans ce domaine, c’est parce que nous nous sommes intéressés très tôt à la problématique de la pénurie d’eau : dès les années 1960, le Commissariat à l’Energie Atomique français imagine de coupler les activités de production d’énergie et de dessalement de l’eau, puis ce sont les géants Suez et Véolia qui développent des techniques de dessalement d’eau de mer, avec succès. Aujourd’hui, ce savoir-faire s’exporte dans tous les pays du monde, et crée de l’emploi : il y a quelques années, en Australie, nos entreprises ont mis en place la plus grande usine du monde affectée au dessalement de l’eau de mer, avec une production atteignant les 450 000 mètres cubes par jour ! Suez Environnement, à l’origine du projet, a supervisé la construction du site, mais gère aussi depuis son fonctionnement, la maintenance et l’exploitation.

 

En quelques années à peine, le dessalement est devenu le troisième marché des géants français du secteur, qui recrutent régulièrement : chercheurs, biologistes, ingénieurs, gestionnaires d’infrastructures, etc… De plus en plus, Suez et Véolia décrochent de nouveaux contrats, dans les pays émergents notamment, où des usines de dessalement d’eau de mer remplacent petit à petit les citernes qui alimentent les villages. Autres gros clients, les Emirats Arabes Unis, qui investissent aujourd’hui des dizaines de millions d’euros pour maîtriser et développer ce savoir-faire. En Europe, Degremont, filiale de Suez, a implanté ses infrastructures dès la fin des années 1960 en France, puis en Espagne, et au final dans plus de 250 pays du monde. Le groupe Suez emploie aujourd’hui près de 100 000 personnes, tandis que son concurrent Véolia en fait travailler 300 000. Chaque année, l’un et l’autre recrutent quelques milliers de nouveaux collaborateurs. D’après l’AID (Association Internationale de Dessalement), plus de 15 000 usines de dessalement tournent aujourd’hui dans le monde, sur un total de 120 pays environ. D’autres industriels français spécialistes de l’énergie passent aussi au dessalement, comme Total Energie Venture, par exemple.

 

Mais il y a aussi quelques start-up tricolores qui commencent à se démarquer sur ce marché : ainsi, la jeune entreprise Circulair, fondée par Geoffroy Gauthier, a reçu un prix en 2017 pour l’invention d’un nouveau procédé de dessalement d’eau de mer, à bas coût et ultra naturel : il s’inspire du processus biologique d’évaporation de l’eau de mer, puis de récupération d’eau douce, en provoquant à partir de cette évaporation, des pluies artificielles. Une approche 100% naturelle, et 100% circulaire, qui permet de diviser par 3 le coût de dessalement d’un mètre cube d’eau salée. Sweetch Energy, une autre start-up, bretonne celle-ci, s’est lancée dans la production d’électricité en développant un procédé que l’on appelle « osmotique », une forme d’énergie bleue, liée à la mer, et provoquée par la séparation des ions entre des solutions salines de concentrations  différentes. Ou comment faire d’une pierre deux coups, et tenter de coupler dessalement d’eau de mer et production d’électricité… Autant de technologies qui sont encore balbutiantes, mais prouvent à quel point le secteur sera porteur, demain. Alors que déjà en 2018, plus de 300 millions de personnes dépendent du dessalement de l’eau pour pouvoir vivre : boire, se laver, ou cultiver leurs champs pour manger.

 

 




1 commentaire

SINAPIN Jean-Louis le 27 mai 2020

Bonjour,
Je cherche un email pour contacter Geoffroy Gauthier ou une personne de Circulair
Merci transmettre
cdt

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